A l'occasion du 40è anniversaire du mouvement du 5 février 1979, l'ancien ministre de la Communication, puis des Zones Économiques Spéciales a accordé un entretien exclusif à PANORAMIK-ACTU au rond-point Poto-Poto. Avec lui, nous avons remonté le temps pour évoquer les 40ans de ce mouvement : 5 février 1979 - 5 février 2019.

 

PANORAMIK-ACTU :  Monsieur le Ministre bonjour !  Le 5 février 2019, le Parti Congolais du Travail (PCT) va célébrer les 40ans du mouvement du 5 février, que pouvez-vous nous dire à propos ?

Alain AKOUALA :   Si j'ai tenu que nous nous retrouvons ici à la commune de Poto-Poto au rond-point, c'est parce que c'est ici que le camarade Dénis SASSOU NGUESSO a prononcé son premier discours qui a été l'aboutissement de ce mouvement. A l'époque, ceux de ma génération, nous étions au lycée. Le fait d'avoir voulu être ici, c’est parce c'est un lieu hautement historique pour notre pays dans la mesure où les Youlou, Opangault etc, ont ait les discours au lendemain de nos indépendances.

C'est une manière pour moi de me reconnecter avec ces vibrations historiques qui ont que, jeunes adolescents et lycéens, avec mes amis, nous avons manifesté lorsqu'il y a eu la Session extraordinaire du Comité Central du PCF au palais du peuple. Sortis du Lycée Technique, nous nous sommes retrouvés à Mafoua Virgile, au Commissariat Centrale devant une haie de la force de l'ordre, parce qu'à l'époque nous voulions aller manifester devant le Palais du peuple. N'étant pas encore habitué aux armes et aux bruits des sélecteurs, nous avions pris la fuite.

 C'est dire que ''nous étions en tant qu'à adolescents au cœur, concernés par ce mouvement ".  Nous dont l'éveil politique a été réalisé sous Marien NGOUABI s'est construit et révélé à travers justement ce discours nationaliste patriotique révolutionnaire et anti-impérialiste.  "Mais la philosophie marxiste qu'on nous enseignait et qui constituait à l'époque un embryon d'un corpus idéologique politique qui nous a façonné à ce jour, qui nous enseignait l’éveil, la critique et l'auto-critique, devrait être permanente pour aller vers une construction d'un pays où règnerait la justice, l'équité, l'égalité, la paix dans le travail". Nous apprenions aussi à travers cette philosophie marxiste notamment le matérialiste historique que "c'était les peuples qui faisaient l'histoire. Nous avons eu le sentiment, nous à 17,18,19ans à travers ce mouvement du 5 février d'avoir été les acteurs de l'histoire ".

Donc d'un passage théorique sous Marien Ngouabi qui nous a donné un creuset idéologique et politique, et bien ‘’ nous nous retrouvons à ce moment-là Acteurs de l'histoire’’. Et le PCT se trouvait à l'époque dans une situation d'hibernation suite au trauma-national que représentait et représente toujours aujourd'hui la mort de Marien Ngouabi, du président Massamba-Débat et le Cardinal Émile Biayenda. Le fait qu'on s'est retrouvé ici, on se dit à ce moment-là, l'histoire du pays repart du bon pied.

 

P-A: À cette époque, le contexte était assez particulier, on parlait de la trilogie déterminante et de certains attitudes, que pouvez-vous dire à propos ?

AA : La trilogie déterminante c'était avant cela. Sous Marien Ngouabi, on parlait d'ailleurs d'une " discipline librement consentie", c’est-à-dire lorsqu'on avait une conscience révolutionnaire et patriotique tout en aimant son pays, on avait pas besoin d'un contre maître au-dessus pour vous dire allez dans telle direction, il suffisait d'être discipliné dans le travail...

« Et la trilogie déterminante, il y avait une formule qui la caractérisait, qui la résumait : " l'action créatrice des masses, c'est le rôle déterminant des cadres ". Autrement dit, les cadres constituaient une espèce d'élite qui devaient être un modèle, qui devait faire en sorte que le peuple dans sa mise en mouvement pour justement créer le bien-être, le développement, construire notre nation, devait être le rôle déterminant des cadres ».

Ce qui entraîne en quelque sorte sur le plan politique le mouvement du 5 février. A cette époque on constatait qu'il y avait une espèce de ligne, une orientation politique au niveau du pays qui marquait maintenant une espèce de schisme entre ceux qui étaient les héritiers de Marien NGOUABI en l'occurrence à leur tête Denis SASSOU NGUESSO que l'on a considéré comme le fidèle continuateur de l'œuvre du camarade immortel Marien NGOUABI et une ligne qu'on a qualifiée de Liquidationniste, une ligne droitière. A ce moment-là il est mis en place une sorte de combat idéologique.

Pour ramener le parti au cœur du fonctionnement politique du pays, ne plus dépendre du Comité militaire du parti qui n'avait que pour mission d'assurer les obsèques du camarade Marien NGOUABI et de maintenir la sécurité et la stabilité au niveau national, suite aux décès tragiques de Marien Ngouabi, Cardinal Émile Biayenda et Massamba-Débat en moins de 10 jours, pouvait conduire à l'implosion de la Nation. Il a fallu que le PCT retrouve son rôle central pour examiner cette situation et se prononcer.

"Il n'y a pas eu coup d'état de palais comme on le dit ,il t'a eu scrutin au niveau du Comité Central du PCT au cours d'une session extraordinaire où je crois que le président Tchistère Tchicaya arrivé en 3è avait affecté ses voies au profit de Dénis SASSOU NGUESSO qui, par la suite ,va accéder à la haute fonction du pays. C'est au nom du fonctionnement centralisé démocratique du PCT que le comité central avait décidé de l'accession de DSN au pouvoir.

 

P-A: Comment appréciez ce mouvement du 5 février en tant qu'acteur politique et quel bilan faites-vous 40ans après ?

 

AA:  En tant qu' acteur politique et membre du Comité  central du PCT,  je dois dire que ce mouvement est un mouvement à consonance nationale, à répercussion nationale. Je pourrais dire que les 5 premières de Denis SASSOU NGUESSO ont été des années extraordinaires. Nous avions senti qu'à l'époque le pays avait progressé sur le plan des infrastructures, de la bonne gouvernance, sur le plan de l'optimisme général au niveau du pays. Le second quinquennat fut marqué par une sorte de crise économique dont dans l'élan du mouvement du 5 février, de l'espérance que ce mouvement avait suscité mais cette économie connaissait déjà quelques signes d'essoufflement.

Voilà pourquoi le PCT, en 1982, va organiser la seule et l'unique conférence nationale dédiée aux entreprises publiques. C'est ainsi que le PCT à cette époque pris la décision de réinjecter dans ces entreprises 300 milliards de FCFA avant dévaluation ; ce qui constitue aujourd'hui 600 milliards de FCFA.  Donc nous nous retrouverons à partir de là dans une situation économique difficile liée déjà à l'époque à un contre-choc pétrolier.  Ensuite, se sont enchaînées la conférence nationale souveraine, la transition et toutes les guerres que nous avons connues.

‘’Donc avec le recul, je me dis ce qui nous avait poussé à manifester à cette époque c'est parce que le PCT dénonçait la corruption, les attitudes bourgeoises dites comprador, liée au fonctionnement de l'appareil étatique, à l’enrichissement. Et donc 40ans après, nous nous retrouvons encore en train de dénoncer les mêmes choses appelées maintenant "les anti valeurs ‘’. Ça veut dire que c'est un moment de césure, de prise de conscience. Donc en tant qu'acteur politique c'est le constat que je fais et je me sens interpellé par rapport à notre situation économique.

 

P-A: Quel message lancez-vous aux congolais?

AA :  40ans après, notre pays est passé par des moments extrêmement difficiles pouvant conduire à l’implosion, sa division et à sa disparition ; parce que nous avons dans ce pays des hommes politiques de renom. ‘’Et ça c'est pour les jeunes qui pensent qu'il fallait mettre en place "une république du cristal", c’est-à -dire où une partie devait se constituer en République parce que considérée naturellement et potentiellement plus riche qu'une autre. NON ! ‘’

40ans après, le président Dénis SASSOU NGUESSO continue et se retrouve en train de dénoncer les anti valeurs qui est un credo majeur.

Pour conclure, le message c'est de dire à tous les camarades, à tous les frères et sœurs congolais « de retrouver cette espèce de discipline librement consentie et de se dire si j'ai une culture des anti valeurs,  si j'ai commis quelques part des anti valeurs, avant que la Haute Cour de Justice n'intervienne ,je dois me sentir moi-même moralement disqualifié car le peuple congolais est un peuple éveillé et sait qui a fait quoi dans ce pays ».

 

P-ACTU : Merci monsieur le ministre d’avoir répondu à nos questions.

 

 

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